Métier de rêve pour aventurier du bout du monde
Qui habite en Antarctique ? Quelles sont les conditions de vie sur le Continent Blanc ? Que voir dans la péninsule Antarctique ? En préparant une croisière en Antarctique, de nombreuses interrogations peuvent surgir. Pour répondre à quelques-unes d’entre elles, nous avons donné la parole à un saisonnier embauché à Port Lockroy sur la minuscule île Goudier, au nord de la péninsule Antarctique. Sa principale mission ? Gérer le bureau de poste le plus austral de la planète et s’assurer que les cartes postées par les croisiéristes venus vivre l’aventure du bout du monde arrivent à destination, mais pas seulement. Rencontre avec un gardien particulier, qui a choisi les manchots pour voisins et la banquise pour refuge.
Plantons le décor : à quoi ressemble Port Lockroy ?
Port Lockroy est situé sur l’île Goudier. Elle est aussi grande qu’un terrain de football, rocheuse et recouverte de glace durant l’hiver. En face, se trouvent d’énormes icebergs. Derrière, encore une île, plus montagneuse. Et partout, des manchots ! La moitié de l’île leur est d’ailleurs réservée et est interdite aux humains. Cela nous rappelle en permanence que nous sommes dans un environnement sauvage, et que nous ne devons pas perturber le mode de vie de la faune.
Les seuls humains en Antarctique sont les scientifiques et les touristes de passage : en quoi consiste la mission de facteur ?
Le côté « facteur » est un des aspects du métier sur place. Nous ne nous occupons pas du courrier pour les bases scientifiques, mais nous sommes en charge de l’oblitération et du tri des cartes postées à Port Lockroy. Il s’agit du bureau de poste le plus austral du monde ! Nous avons notre propre timbre, dessiné par la poste britannique, notre tampon officiel de l’Antarctique, ainsi que notre propre boîte aux lettres. Cela fait partie de l’expérience au pôle Sud quand on fait une croisière en Antarctique : envoyer du courrier du bout du monde.
Mais à Port Lockroy, il n’y a pas que le courrier. Nous nous occupons aussi du musée dédié à l’aventure antarctique et de la boutique de souvenirs. Nous entretenons aussi les lieux et nous menons à bien une mission plus scientifique, axée sur l’étude de la reproduction des manchots et l’impact de l’homme sur l’environnement, par exemple.
Vous travaillez donc en équipe et dépendez de la poste britannique ?
Nous sommes quatre à vivre en quasi-autarcie de mi-novembre à mi-mars, les mois qui correspondent à l’été en Antarctique. Chaque année, les équipes changent. Nous sommes embauchés par l’association UKAHT (United Kingdom Antarctic Heritage Trust), chargée de gérer le patrimoine de la Grande-Bretagne en Antarctique. Port Lockroy était l’une des neuf bases militaires britanniques créées par Winston Churchill pendant la Seconde Guerre mondiale. Aujourd’hui, il ne reste que six de ces sites. Seul Port Lockroy, qui était la « Base A », est en activité.
Quelles sont les conditions de vie sur place ?
Elles sont assez sommaires ! L’île comporte trois bâtiments : le musée-boutique qui n’a pas changé depuis les années 50, un hangar à bateaux où est stockée la marchandise, et l’endroit où nous vivons. Il est de même taille et situé au même emplacement que l’original. Il faut savoir qu’aucune nouvelle construction n’est autorisée en Antarctique. Nous n’avons pas d’eau courante, pas de toilettes, pas de douche. Nous nous nourrissons de conserves, de préparations lyophilisées, de riz ou de pâtes. Quelques panneaux solaires nous permettent de générer un peu d’électricité. Concernant les vêtements, nous sommes équipés par UKAHT avec des habits de haute montagne. Durant la période où nous sommes sur place, la température varie entre -15 et 5 °C, et le jour ne se couche jamais. Nous avons un téléphone satellite en cas d’urgence, car nous sommes à sept jours de bateau d’Ushuaia.
Le recrutement pour ce type de travail est-il particulier ?
Une première sélection sur dossier permet à l’UKAHT de choisir douze personnes parmi 660 postulants. Ces douze candidats passent ensuite des oraux en Angleterre ainsi que deux jours intenses entre tests psychologiques, parcours du combattant, confection de nœuds marins, épreuves de force, de logique, d’électricité, de maîtrise de logiciels, jeux et activités les yeux bandés, comme monter et démonter une tente. Le but est de savoir comment les candidats se comportent en équipe, dans des conditions inhabituelles.
Pourquoi avez-vous postulé ?
Je vis de cette manière depuis six ans, en conciliant ma passion pour le voyage et en travaillant dans des lieux isolés. J’ai été gardien de refuge en Haute-Savoie en été et en plein hiver ; dans des fjords ou dans des lodges préservés sur des îles loin de tout, en Nouvelle-Zélande ou en Thaïlande. J’ai déjà visité tous les continents. Il ne me manquait plus que l’Antarctique, où je voulais vraiment aller, sans juste y passer. Grâce à ce poste, je combine le goût de l’aventure et du partage, avec un travail unique. Et je suis amené à rencontrer d’autres amoureux de l’Antarctique. C’est grisant !
Crédits photos : © Istock
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