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24 heures à Kullorsuaq,
avec les derniers gardiens du pôle

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Dans le regard du photographe Julien Fabro

De retour d’un repérage à Kullorsuaq en mars 2023, Julien Fabro, qui accompagne les équipes PONANT autour de la planète, partage son regard sensible sur sa rencontre avec Gabriel, Paulus, Adam, Ole et Mattias, certains des derniers chasseurs traditionnels du Groenland. Ils l’ont guidé lors d’une expédition de 24 heures sur la banquise. Une expérience immersive initiatique synonyme de transmission et d’humilité..

Au départ de Kullorsuaq : « là-bas, on ne joue pas »

chasseur inuit – Voyage Kullorsuaq – Julien Fabro

17 mars – 18 heures

« Au départ de notre expédition, la lumière était particulièrement belle. Un moment suspendu entre la golden hour du coucher du soleil et la blue hour, lorsqu’il glisse lentement sous l’horizon. Aux couleurs chaudes se mêlent alors des couleurs froides, comme le bleu et le violet. Sous ces hautes latitudes, le ciel s’obscurcit vers minuit seulement à cette période de l’année. Le temps semble s’étirer, prolongeant le plaisir de la contemplation de ces reflets pastel sur la glace. Cette luminosité nous a accompagnés tout au long de nos quatre heures de trajet en traîneaux à chiens vers le lieu où nous passerons la nuit sur la banquise.

Gabriel porte des vêtements traditionnels, mais là-bas on ne joue pas. Il ne les porte pas pour le folklore. Ces chasseurs sont connectés à leur environnement et s’adaptent à la puissance des éléments depuis des siècles. Ces vêtements sont leurs meilleurs alliés. Rien de plus efficace qu’une peau d’ours et des peaux de phoques pour se protéger des températures extrêmes qui peuvent descendre jusqu’à -30°C.

Nous passerons la nuit au cœur de l’une des zones que les inuits groenlandais appellent Nunanutaat (terres inconnues). Ils nous ont expliqué que ces nouvelles étendues d’eau ou de terre qui se dévoilent à mesure que les glaciers reculent sont protégées par des esprits. Ces espaces suscitent chez eux un sentiment de peur mais aussi beaucoup de curiosité. Cette relation mystique traduit leur sagesse et leur prudence face à ces espaces inconnus qu’ils apprennent à explorer.”

Une nuit sur la banquise

Une-nuit-sur-la-banquise

17 mars – 23 heures

“Nous avons dormi sur des peaux d’ours posées sur deux traîneaux côte à côte, protégés par une toile tendue grâce aux longues lances qu’ils utilisent pour sonder la glace. J’ai été subjugué par leurs gestes précis, rapides, et parfaitement millimétrés lorsqu’ ils ont installé le campement éphémère sur la banquise. Pas de temps à perdre pour éviter les morsures du froid. Chaque détail compte. Leur efficacité m’a rappelé à quel point leur savoir est issu de traditions millénaires transmises de génération en génération.

Le petit réchaud installé sous la tente autour duquel nous avons fait sécher nos affaires et nous avons pris le temps d’échanger m’a plongé dans mes propres souvenirs de famille : j’ai tout de suite repensé à la lampe à pétrole de mon grand-père.

Quant à la viande de phoque grillée qu’ils nous ont proposé de goûter pour le dîner… Elle était délicieuse ! Je ne m’attendais pas à cette saveur qui évoque celle du saumon au barbecue.

Habituellement, lorsqu’ils partent pour plusieurs jours sur la banquise, ils n’emportent que le strict minimum, sans provisions. Ils se nourrissent uniquement de ce qu’ils arrivent à pêcher ou à chasser. Pour cette fois-ci, le repas avait été anticipé, car nous ne sommes pas habitués à affronter le froid le ventre vide.”

Au petit matin : le sourire d’Ole

Une-nuit-sur-la-banquise

18 mars – 7 heures

« On pourrait penser que les Inuits sont durs et peu dans l’échange, mais en réalité ils sont très rieurs, blagueurs et tournés vers les autres. Ole vient vers nous avec un grand sourire au petit matin pour prendre le pouls, savoir comment s’est passée notre nuit sur la banquise et s’assurer qu’on apprécie l’expérience qu’ils ont eu envie de partager avec nous.

Même si la nuit a été fraîche malgré nos équipements conçus pour résister aux températures les plus basses, je lui renvoie le même grand sourire. Je tiens à lui transmettre le sentiment de gratitude que j’ai pour lui et ses amis chasseurs d’avoir accepté de nous faire vivre cette aventure si précieuse pour comprendre leur mode de vie.

Je me suis senti 100 % en confiance cette nuit-là devant la maîtrise que ces hommes ont de leur environnement. Des ours auraient pu approcher pendant la nuit, mais avec la cinquantaine de chiens qui montaient la garde, j’étais serein.”

Les sens en éveil, dans la peau d’un musher

Sur un traineau à chiens – Voyage Kullorsuaq – Julien Fabro

18 mars – 10 heures

« J’ai effectué des réglages sur mon appareil en mode vitesse lente pour obtenir un effet de mouvement sur la neige, qui donne toute sa dimension à cette photo. Je voulais traduire cette sensation de glisse. L’attelage de 15 chiens file à environ 15 km/h. Le fouet flotte dans le vent. Adam dirige ses chiens : « Ililililili » pour aller à droite, « Yukyukyukyuk » pour aller à gauche.

J’ai été fasciné par la manière dont il communiquait avec eux. L’immersion était à la fois visuelle, auditive et olfactive car les chiens dégageaient une odeur très forte. Tous les sens étaient en éveil. La barrière de la langue a disparu lorsque j’ai demandé à Adam avec des gestes simples si je pouvais tenter de guider les chiens à mon tour. J’ai senti son étonnement et sa fierté alors que je m’appliquais à reproduire ses petits cris aigus. Aux commandes de ce vaisseau des glaces, une sensation de plénitude m’a envahi. »

Tracer sa propre voie dans l’immensité glacée

 traineau à chiens sur la banquise – Voyage Kullorsuaq – Julien Fabro

18 mars – Milieu de journée

« Lorsque je prends cette photo, je n’ai pas conscience de quelle heure il est, ni de quel jour où on est. Je n’ai plus aucun repère. Je me sens complètement hors du temps. Sur cette immensité blanche, aucune autre trace à part la nôtre. »

Pause câlin pour les hommes et leurs chiens

Attelage de chiens de traineaux sur la banquise – Voyage Kullorsuaq – Julien Fabro

18 mars – 16 heures

« Pendant la pause, les chasseurs prennent soin de leurs chiens qu’ils aiment profondément, même s’ils sont très exigeants avec eux lorsqu’ils les dirigent. Les cinq attelages étaient réunis près d’un iceberg pris dans la banquise, suffisamment éloignés les uns des autres pour qu’ils ne se mélangent pas.

On a fait fondre de la neige dans un récipient sur le réchaud pour boire du thé, un peu de soupe, et on a mangé des bonbons. On était frigorifiés. Lorsqu’ils ont froid, les chasseurs ont des techniques étonnantes pour se réchauffer : bataille de chatouilles ou fausse bagarre. J’ai posé mon boîtier photo et je me suis amusé avec eux. Objectif : faire tomber l’autre par terre. »

Portrait de famille

chasseur inuit et ses chiens – Voyage Kullorsuaq – Julien Fabro

18 mars – 16 heures

« Mattias est le chasseur le plus respecté. C’est le chef. Celui qui parle le moins, mais sans son accord, rien ne se fait. Il est petit, fin, et plutôt âgé. Il ne paye pas de mine quand on le rencontre pour la première fois, mais une fois équipé sur la glace, on est face à un surhomme, comme tous ces chasseurs.

Cette photo peut paraître simple au premier abord, mais lorsqu’on prend du recul, il s’agit presque d’une photo de famille. Mattias trône au centre de l’image avec ses chiens, qui lui obéissent. Il pose avec fièrement avec eux. On peut voir à quel point ils sont importants pour lui. Ils font partie de lui. Il y a une notion d’héritage. Ces hommes sont les gardiens du dernier bastion des chasseurs traditionnels groenlandais. Il se dégage quelque chose d’animal, une puissance folle. »

Aurores boréales dans le ciel de Kullorsuaq

 village dans la nuit – Voyage Kullorsuaq – Julien Fabro

18 mars – Minuit

« De retour à Kullorsuaq, je suis sorti peu avant minuit, alors que la nuit venait de tomber. Je me suis promené dans les rues du village et je suis allé sur la banquise, face au village. J’ai posé mon trépied et j’ai réglé mon appareil pour réaliser une pause longue afin de capter le maximum de lumière. On aperçoit donc sur la photo les couleurs des aurores boréales qui n’étaient pas visibles à l’œil nu.

J’ai activé le retardateur pour me laisser le temps de me positionner dans le cadre que j’avais choisi. Le halo de lumière émis par mon téléphone donne de la profondeur à l’image. Avec cette mise en scène, je voulais raconter une histoire, celle d’un explorateur qui découvre ce village de nuit. »

Seul dans les glaces

homme sur la banquise – Voyage Kullorsuaq – Julien Fabro

19 mars – 5 heures 

« La nuit a été courte. Avec Nicolas Dubreuil, l’explorateur polaire français spécialiste du Groenland et co-fondateur de SEDNA qui habite à Kullorsuaq une partie de l’année et qui nous a ouvert les portes de ce monde de glaces, nous sommes partis tous les deux bien avant le lever du soleil en direction des hauteurs du village. Nous sommes ensuite redescendus sur la banquise. Je suivais ses traces et je l’ai laissé avancer seul, éclairé par les lumières incroyables qui sublimaient cette étendue lisse et désertique. Sous nos pas, un mètre de glace, et les profondeurs de la mer de Baffin.

Nicolas est un conteur, un passeur d’histoires. Seules son énergie, sa détermination et sa capacité à établir un lien entre nous et ces chasseurs qui souhaitent partager leur quotidien avec des voyageurs, ont rendu cette aventure extraordinaire possible. »

Julien Fabro

Photographe et réalisateur, Julien Fabro sillonne la planète du pôle Nord à l’Antarctique, pour le compte de grandes marques. Sa philosophie ? Créativité, émotion, exploration et engagement. Créateur de contenus aux multiples talents, il maitrise à la fois la photo, la vidéo, les images embarquées ou aériennes. Il partage également ses aventures et voyages aux quatre coins du monde avec sa communauté sur les réseaux sociaux.

Crédits photos : ©PONANT / Julien Fabro

Photo banquise - Groenland

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