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Paul-Émile Victor: portrait d’un pionnier de l’exploration polaire

Les peuples et les pôles en héritage 

Il existe des rencontres qui déterminent le cours d’une vie. Celle entre le jeune ethnologue en devenir Paul-Émile Victor et l’illustre explorateur Jean-Baptiste Charcot, figure de proue de l’exploration française en fait partie. Cécile Manet, guide-naturaliste PONANT spécialiste de l’histoire des grands explorateurs, nous éclaire sur le parcours de ce passionné des régions polaires.

Premières expéditions au Groenland

Sa ténacité et sa force de conviction séduisent Jean-Baptiste Charcot, qui voit en lui un successeur tout désigné. « Mon p’tit, je vous emmène », aurait-il déclaré convaincu, embarquant l’ethnologue à bord de son légendaire trois-mâts, Le Pourquoi Pas ?, en 1934 aux côtés de l’anthropologue et médecin Robert Gessain, du géologue Michel Pérez et du cinéaste Fred Matter. Débarqué à Angmagssalik au Groenland, sa rencontre avec les populations locales éveille en lui une compréhension précoce des enjeux liés à la préservation de leur mode de vie.

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Illustration extraite de la bande dessinée Paul-Émile Victor, la soif d’aventure, 1905-1937, de S. Dugast, S. Niveau, L. Seigneuret et F. Fleury, parue aux éditions du Sekoya en mars 2024. 

 

L’année suivante, il organise avec ses compagnons une traversée de la calotte glaciaire groenlandaise d’est en ouest sur 800 km, en traineaux à chien, qu’ils réalisent en 40 jours. C’est au cours de cette expédition, grâce à son approche respectueuse envers les Groenlandais, qu’il tisse des liens avec une communauté inuite à Kangerdlugssuatsiak. Jean-Baptiste Charcot le dépose de nouveau dans cette région en août 1936 (juste avant de trouver la mort au large des côtes islandaises) pour un second hivernage, cette fois en solitaire. Paul-Émile Victor n’apprendra la disparition de son mentor, avec une partie significative des éléments collectés lors de l’expédition trans-groenlandaise, qu’en 1937.

La motivation de Paul-Émile Victor repose avant tout sur la compréhension des peuples Inuits – à l’époque, il utilise encore le terme Eskimo. Il souhaite s’immerger dans leur culture, découvrir leur mode de vie et leur relation avec la nature.

Cécile Manet

Guide-naturaliste PONANT

En immersion chez les Inuits

Pendant quatorze mois, l’explorateur français vit une expérience intense de la culture inuite, dans des conditions extrêmes et souvent hostiles. En « eskimo parmi les eskimos », comme il le relatera plus tard dans ses ouvrages, il cohabite avec une trentaine de personnes dans un logement rudimentaire.  Il s’éprend d’une jeune femme nommée Doumidia, avec qui il partagera une histoire pendant plusieurs années. Les locaux, qui ont le plus grand mal à prononcer son nom, l’appellent affectueusement « Wittou ». Lui, parle le groenlandais auquel il s’est déjà initié lors de ces précédents voyages, et lorsque cela ne suffit pas à se faire comprendre il utilise le langage des gestes.

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Illustration extraite de la bande dessinée Paul-Émile Victor, la soif d’aventure, 1905-1937, de S. Dugast, S. Niveau, L. Seigneuret et F. Fleury, parue aux éditions du Sekoya en mars 2024. 

 

« Lorsqu’il arrive pour l’hivernage, il est d’abord surpris par l’odeur omniprésente des phoques », raconte Cécile Manet. Les populations inuites utilisent cet animal dans tous les aspects de leur vie quotidienne, notamment pour se nourrir et se vêtir. Aux côtés des Inuits qui le considèrent comme l’un des leurs, l’explorateur apprend à chasser, à tirer le meilleur des ressources naturelles locales et à construire des abris pour se protéger du froid. Cette expérience le marque profondément et renforce sa connexion avec les peuples autochtones ainsi que son engagement pour faire connaître et protéger cette culture.

Collecte et partage de connaissances

Paul-Émile Victor parvient à saisir l’essence de ces territoires à travers ses nombreux écrits, ses photographies, ses dessins et les objets collectés pendant cette période. Il en rapporte une étude approfondie de ces peuples et constitue un trésor de 4 000 pièces ethnographiques. Ses travaux contribuent également à approfondir les recherches sur les caractéristiques géographiques du Groenland grâce à des cartographies détaillées. Sur le plan biologique, ses échantillonnages méticuleux de la faune et de la flore sont précieux.

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Illustration extraite de la bande dessinée Paul-Émile Victor, la soif d’aventure, 1905-1937, de S. Dugast, S. Niveau, L. Seigneuret et F. Fleury, parue aux éditions du Sekoya en mars 2024. 

 

À son retour de ces expéditions, à la fin des années 1930, le très charismatique Paul-Émile Victor bénéficie d’une attention médiatique considérable. Ces archives, qui constituent un héritage majeur dans le domaine de l’exploration, sont pour la plupart conservées au musée de l’Homme à Paris. Le directeur du musée lui offre une série de conférences au cours desquelles il utilise ses talents d’orateur pour présenter ses découvertes et sensibiliser le public à la richesse et à la fragilité des régions polaires. Au fil des années, il devient un conférencier renommé et continue de partager ses expériences et ses connaissances lors de divers événements, conférences et rencontres publiques. Son objectif était de mettre en valeur le potentiel scientifique, géographique et culturel de ces régions et de faire de la France un acteur majeur de ces domaines.

À l’instar de Jean-Baptiste Charcot, Paul-Émile Victor estimait que la France ne s’investissait pas suffisamment dans l’exploration polaire.

Cécile Manet

Guide-naturaliste PONANT

L’artisan de la grande aventure polaire française

En 1947, au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, durant laquelle il a mis ses talents d’aviateur au service de l’US Air Force tout en initiant les troupes à la connaissance des territoires arctiques, Paul-Émile Victor participe à la création des Expéditions Polaires Françaises (EPF). L’organisation, qu’il dirige jusqu’en 1976, est la première entièrement dédiée à la collecte de financements publics et privés pour la recherche scientifique et l’exploration des régions polaires. Dès l’année suivante, elle permet le départ d’une nouvelle série d’expéditions françaises au Groenland et en Terre Adélie (Antarctique). De nombreux raids polaires et hivernages seront également réalisés, permettant l’installation de bases scientifiques permanentes au cœur des territoires sauvages.

Grâce à sa contribution à la fois matérielle et intellectuelle dans la connaissance des peuples du Groenland et dans la préservation de leur écosystème, Paul-Émile Victor a réussi à inscrire son nom dans la légende des grandes explorations. C’est l’œuvre d’une vie qui a permis à la France de tenir son rang parmi les grandes nations polaires.

Paul-Émile Victor : 6 dates-clés

1907 : naissance à Genève. 

1934 : organisation de sa première expédition ethnographique vers la côte Est du Groenland grâce à sa rencontre décisive avec Jean-Baptiste Charcot. 

1936 : traversée de la calotte glaciaire d’Ouest en Est avec 3 autres explorateurs. À son arrivée, il reste 14 mois parmi les Inuits à Kangerlussuatsiaq.

1940 : mobilisation dans la marine française pendant la Seconde Guerre mondiale.

1947-1976 : création et direction des Expéditions Polaires Françaises (EPF).

1977 : installation en Polynésie. Il y rédige ses mémoires et continue de s’engager pour la préservation de l’environnement.

Crédits photos : ©Editions du Sekoya mars 2024

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