L’expédition autour du monde contre la pollution plastique
La pollution plastique fait aujourd’hui partie des enjeux écologiques les plus urgents. Si les actions classiques consistent à tenter d’enrayer le phénomène, le projet Plastic Odyssey va plus loin. En 2020, un bateau autosuffisant sillonnera les océans, faisant escale aux quatre coins du globe pour y échanger sur le recyclage du plastique. Rencontre avec Maïté Abos, responsable de l’association.
Plastic Odyssey en quelques mots ?
Plastic Odyssey est une association créée il y a deux ans par deux officiers de la marine marchande et deux ingénieurs. Leur constat ? Énormément de plastique sur nos côtes se retrouve dans l’océan. La solution la plus simple semblerait de le ramasser. En réalité, seul 1 % des déchets plastiques flottent à la surface, le reste coule et se dégrade en microparticules, ce qui les rend quasiment impossibles à repêcher. Pour stopper le problème à la source, nous développons de nouvelles solutions pour transformer les déchets en objets utiles, avant qu’ils n’arrivent dans l’eau. Les solutions existantes jusque-là sont technologiques et extrêmement chères, donc réservées aux pays industrialisés. Nous nous inspirons donc de machines qui existent déjà dans nos pays, et nous les adaptons en machines low tech, simples à construire, faciles à réparer, qui ne consomment que très peu d’énergie. Nous avons décidé de les construire sans brevet, afin que n’importe qui puisse les dupliquer pour les adapter à son environnement.
Des exemples de machines ?
Le capteur de tri qui fonctionne avec de la spectroscopie. Aujourd’hui, un petit capteur de tri bon marché coûte 15 000 € ; le nôtre, maximum 100 €. Il y a également une machine de recyclage : broyer des déchets plastiques, les laver, les faire passer dans une extrudeuse, les faire fondre. Cela ressemblera à une sorte de pâte à modeler, avec laquelle on peut fabriquer n’importe quel type d’objet utile et surtout durable : des briques pour les maisons, des pavés pour les routes, du mobilier. La troisième machine consiste à transformer des déchets non recyclables en carburant. Avec un kilo de plastique, on peut faire un litre de carburant. Toutes ces machines seront à bord du bateau, qui avancera en transformant des déchets plastiques en carburant.
Où en est le projet aujourd’hui ?
La première étape du projet était de mettre à l’eau un catamaran prototype de cinq mètres : cela a fonctionné. Aujourd’hui nous travaillons sur des machines à visée pédagogique. Fin 2020, une quinzaine de personnes embarqueront sur le bateau, même si l’action de l’association se fera surtout à terre. À chacune des trente escales, nous mettrons en place un village ambulant, dans lequel nous présenterons les alternatives au plastique, ainsi que des solutions qui soient accessibles à tous. Nous organiserons également des ateliers et des formations, pour co-construire avec les locaux.
Où s’arrêtera le bateau ?
Nous partirons de Marseille, ferons un tour en Méditerranée, puis en Afrique, en Amérique du Sud, et enfin en Asie, pour revenir par le sud de l’Afrique jusqu’au point de départ.
Le reste du parcours est toujours en cours d’élaboration. Nous avons regardé les côtes qui étaient les plus polluées par les déchets plastiques.
Comment préparez-vous ces différentes étapes ?
Nous travaillons avec des chercheurs en anthropotechnologie, afin d’identifier les équipements sur place, les éventuels freins culturels, sociaux, liés à des croyances. L’appropriation de nos machines est un enjeu majeur pour nous, et nous voulons intégrer le facteur humain pour ne pas en rester à des solutions uniquement technologiques. On nous pose souvent la question : vous n’avez pas peur d’être copiés ? Tant mieux si on nous copie !
Tous les déchets récoltés seront-ils utilisés pendant le voyage ?
La récolte de déchets sera faite à terre, à chaque escale, et non en mer. Les déchets recyclables seront transformés en objets, les non recyclables en carburant. Nous démontrons ainsi que les déchets peuvent être une ressource, pour faire fonctionner un bateau, un deux-roues ou un groupe électrogène.
Plastic Odyssey : un lien avec le mythe d’Ulysse ?
Bien sûr ! Notre odyssée s’incarne autour du plastique. Un voyage presque initiatique, où nous allons partager et apprendre. Nous visons des destinations où nous avons beaucoup à apporter mais également des destinations dans lesquelles il y aura à prendre.
C’est le cœur de votre philosophie ?
Oui. Lier environnement et question sociale. Montrer qu’il y a une économie du plastique usagé, que nous pouvons créer de l’emploi autour du recyclage, et faire des objets utiles à partir de déchets. Lutter contre la pollution plastique et la pauvreté en même temps.
Les mentalités évoluent-elles ?
Oui, beaucoup d’associations mènent déjà des actions de sensibilisation. Aujourd’hui, il existe deux solutions : les solutions industrielles, coûteuses, techniques, high-tech, réservées aux pays développés. De l’autre côté, des initiatives très artisanales, comme la collecte manuelle sur les plages. Il fallait développer un entre-deux : des outils accessibles à tous, qui ne coûtent quasiment rien à fabriquer, rentables très vite, afin que l’on puisse recycler des petites quantités de plastique et en faire très vite des ressources.
La Fondation PONANT
PONANT poursuit ses actions en faveur d’un tourisme durable avec la création d’une Fondation