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Les Waraos : maîtres du fleuve et de l’histoire

À la découverte des Indiens de l’Orénoque

Sur les rives du troisième fleuve le plus important d’Amérique du Sud – l’Orénoque – vivent encore des peuples quasiment vierges de toute modernité : les Indiens waraos. Ils figurent parmi les ethnies les plus anciennes de ce monde, identiques à celles découvertes par les conquistadors dès le XVIe siècle.

Le fleuve Orénoque, l’autre artère de l’Amérique du Sud

Lien fluvial et historique de plus de 2000 kilomètres entre le Venezuela et la Colombie, le fleuve Orénoque relie les montagnes de la Sierra Parima à l’océan Atlantique. Petit frère de l’Amazone, il ne se laisse franchir qu’à deux endroits au Venezuela : Ciudad Bolivar et Puerto Ordaz. L’Orénoque a en effet la particularité de ne compter que deux ponts et le dernier d’être assez récent puisque construit en 2006. Pour Jules Verne il était « Le superbe » dans un roman paru en 1898, et pour Daniel Defoe la prison symbolique de son illustre Robinson Crusoé. Le naufragé le plus célèbre de l’histoire a passé ses 28 années de solitude sur une île située dans l’embouchure du fleuve.

Pour peu qu’il ait eu une embarcation suffisamment solide, il aurait pu rejoindre les côtes, découvrir le fameux delta de l’Orénoque et y faire la connaissance des Indiens waraos, les habitants séculaires de ce formidable labyrinthe de 300 canaux et de 25 000 km2, dont on estime la population aujourd’hui à environ 30 000 individus.

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Les Waraos, gardiens du fleuve Orénoque

L’Orénoque abrite à ce jour trois grandes familles indigènes : les Arawaks, sédentaires et pacifiques, les Caribes, d’anciens guerriers nomades et les Chibchas, peuple menacé de disparition. Et puisque l’ethnologie a ses limites, elle a préféré ne pas intégrer dans ses familles d’autres ethnies comme les Yanomami par exemple, ou les Waraos. Chacune de ces communautés se considère politiquement et économiquement autonome, ce qui ne les empêche pas d’entretenir entre elles un lien social fort, notamment grâce à des langues qui malgré leurs différences s’avèrent mutuellement intelligibles. Dans ce formidable réseau naturel, les Waraos ou « maîtres des pirogues », font figure de gardiens du fleuve, un statut hérité de leur mythe fondateur. Ils seraient les descendants d’un premier homme, arrivé il y a des milliers d’années sur les rives de l’Orénoque à bord d’une barque taillée depuis un tronc d’arbre entier. Une légende dont les Waraos ont aussi hérité leur art de la pirogue, qu’ils fabriquent toujours de la même façon depuis des siècles. D’après un tronc unique, ils creusent le bois avant d’en brûler l’intérieur pour le fortifier. Sur l’Orénoque – alias Guirinoko ou « là où on pagaie » en waraos – leur coup de pagaie est muet et leur embarcation semble posée sur un rail.

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Passé, présent, futur

Les Indiens waraos sont dispersés entre la côte et l’intérieur du pays vénézuélien, une différence géographique faisant que « ceux de la mer » sont des pêcheurs qui exploitent également le palétuvier, quand « ceux de l’intérieur » sont des chasseurs qui vivent aussi du cœur de palmier. Bien qu’en mouvement permanent, les Waraos établissent des lieux d’habitation précaires : maisons sur pilotis au toit en feuille de palmier, sans murs et ouvertes sur l’extérieur. Des lieux de vie commune dont les propriétaires sont les femmes, puisque les Waraos vivent en quasi matriarcat. Étant souvent à la merci des intempéries, ils ont pris l’habitude de vivre léger et de ne pas s’attacher à la dimension matérielle des choses.

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Leur entrée en contact avec la civilisation moderne a singulièrement modifié leurs habitudes de vie puisque, à l’origine peuple nomade, les Waraos ont désormais tendance à se sédentariser. Un mode de vie en mutation qui leur permettait jusque-là de vivre en meilleure symbiose avec leur environnement, ne consommant que ce que la nature leur proposait en un lieu et un temps donné… principe archaïque des chasseurs-cueilleurs. Plus que les gardiens du fleuve, ils sont aujourd’hui en première ligne sur les questions de déforestation et d’impact écologique. Une situation fragile dont ils ne sont plus les victimes passives puisqu’ils ont récemment réussi à contraindre un grand groupe industriel à quitter leur territoire.

À l’est du Venezuela, entre fleuve, mer et jungle, se cachent les gardiens d’une histoire millénaire et d’un monde encore méconnu. Un saut dans le passé pour les voyageurs en quête d’absolu.

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